Dieudonné is a Actor, Director, Scenario Writer and Producer French born on 11 february 1966 at Fontenay-aux-Roses (France)
Dieudonné
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Birth name Dieudonné M'Bala M'BalaNationality FranceBirth 11 february 1966 (58 years) at Fontenay-aux-Roses (
France)
Dieudonné M'bala M'bala (born 11 February 1966), generally known by his stage name Dieudonné ([djø.dɔ.ne]), is a French comedian, actor, and political activist. Initially an anti-racist activist, he later became close to the far-right Front National. Since 1997, Dieudonné has regularly stood in parliamentary and European Union elections as a candidate at the head of fringe or splinter parties, and has tried and failed to run in two French presidential elections (2002 and 2007). He openly supported Mahmoud Ahmadinejad's views on Israel and the Jewish people. He has made "heil" like signs on television as part of a sketch that made controversy, and has described Holocaust remembrance as "memorial pornography". He has been convicted in court eight times on antisemitism charges.
In response to Dieudonne's numerous antisemitic statements, French Interior Minister Manuel Valls stated that Dieudonne was "no longer a comedian" but was rather an "anti-Semite and racist" and that he would seek to ban all Dieudonne's public gatherings as they amounted to a public safety risk. Biography
Jeunesse
Dieudonné naît en 1966 d'une union entre Josiane Grué, une sociologue française originaire de Bretagne, et Dieudonné Joseph M'Bala, un expert-comptable camerounais originaire du village d'Olama et de l'ethnie Ewondo. Baptisé, ayant effectué sa communion et été élevé dans une école religieuse, il grandit en banlieue parisienne, dans les Hauts-de-Seine puis dans l'Essonne. Il habite successivement à Antony, Bagneux et Verrières-le-Buisson, dans un milieu qu'il qualifie de « populaire, plutôt de gauche ».
Dieudonné passe sa jeunesse au sein d'une famille plutôt sympathisante de gauche, qualifiant ses parents d'« intellectuels » et « d'éternels étudiants », vivant « au milieu des livres », ce qui l'amène à penser qu'il était « privilégié » « par rapport à [ses] copains de banlieue ». Sorti du lycée Lakanal de Sceaux et du lycée Michelet de Vanves sans diplôme, il commence à travailler comme commercial polyvalent. Lui-même décrit ses débuts dans la vie active en ces termes : « Six mois dans chaque boîte, pas plus. Juste ce qu'il faut pour toucher les Assedic ». Durant ses périodes de chômage, il s'essaie à l'écriture de sketches comiques.
Premières années de sa carrière d'humoriste
Duo avec Élie Semoun
Dieudonné fait ses débuts sur scène dans des cafés-théâtres, où il se produit avec Élie Semoun, un ami qu'il a rencontré en terminale. En 1991, une participation à une « scène ouverte » au Café de la Gare leur permet de se faire remarquer. Dans les années 1990, le duo Élie et Dieudonné accède rapidement à la notoriété, notamment grâce à ses passages à la télévision en 1992. Les deux partenaires, l'un petit et juif, l'autre grand et noir, jouent à la fois sur le contraste entre leurs physiques et sur l'auto-dérision, qu'il s'agisse de plaisanter sur leurs propres origines ou sur les tensions entre communautés, notamment dans des sketchs mettant en scène « Cohen », interprété par Élie, et « Bokassa », interprété par Dieudonné. Élie et Dieudonné apparaissent comme un duo comique antiraciste, ayant pour habitude de reprendre au second degré les discours et les attitudes racistes, comme les diverses intolérances, pour mieux les parodier et les dénoncer. Leurs spectacles, Élie et Dieudonné, mis en scène par Pascal Légitimus, puis Élie et Dieudonné en garde à vue, rencontrent d'importants succès publics.
Dieudonné crée en 1993 avec Élie Semoun la société Bonnie Productions ; l'essentiel du capital en est cependant détenu par Dieudonné et son frère. L'humoriste crée par la suite plusieurs autres sociétés de production et d'édition. Dieudonné assure la gérance du duo, et se montre de plus en plus pointilleux sur le plan professionnel, qu'il s'agisse des aspects financiers — exigeant qu'Élie et lui soient rémunérés pour se produire dans des émissions auxquelles, à leurs débuts, ils participaient gratuitement — ou du contenu artistique — il refuse par exemple d'interpréter une caricature d'Africain dans l'émission Coucou c'est nous !. Dieudonné acquiert ainsi dans les années 1990, dans les milieux du spectacle, une réputation de personne intransigeante, voire d'« emmerdeur ». En parallèle à son duo avec Élie Semoun, il travaille avec d'autres humoristes : en 1993, il met ainsi en scène le second one-man-show de Didier Bénureau.
En 1994, le duo remporte un franc succès en interprétant sur France 2 une émission spéciale, L'Avis des bêtes : une certaine idée de la France, pour laquelle la chaîne leur avait donné carte blanche. Ils y interprètent divers sketches, et partagent la vedette avec d'autres artistes comme Franck Dubosc, Dany Boon et Tom Novembre. La même année, Dieudonné apparaît dans le clip du titre Ça fait partie de mon passé de Fabe. C'est également en 1994 qu'il s'installe en Eure-et-Loir avec son épouse et ses enfants, à Saint-Lubin-de-la-Haye, dans une ferme qui sert également de lieu de travail aux permanents de sa société de production. Dieudonné utilise la ferme pour loger un collectif artistique informel, installer des studios et produire du spectacle vivant. Il acquiert également au Mesnil-Simon une demeure, qui devient ensuite son domicile principal et le siège de sa société.
En 1995, Dieudonné interprète en solo un single, J'm'en cure le zen. Il sort l'année suivante Le chant du muet, recueil de poèmes et de chansons humoristiques. Il participe également aux activités des Enfoirés, en contribuant au spectacle Les Enfoirés à l'Opéra-Comique (1995). Dans le même temps, ses relations avec Élie Semoun se détériorent. Le fait que Dieudonné assure la gestion financière du duo finit par entraîner une brouille avec son partenaire ; en 1997, peu après le tournage du film Le Clone, premier et dernier long-métrage à mettre le duo en vedette, les deux compères se séparent. Dieudonné explique cette rupture par le fait qu'« Élie rêvait depuis toujours de faire du cinéma. Lorsque la situation s'est présentée, il a tout naturellement consacré son temps à cette nouvelle et difficile discipline. J'ai pour ma part continué une carrière sur scène ». Élie Semoun dénonce quant à lui l'attitude en affaires de Dieudonné, à qui il reproche d'être « un vendeur de bagnoles, totalement obnubilé par l'argent » et d'avoir réparti les revenus du duo de manière inéquitable.
Carrière en solo
En 1997, peu après la séparation du duo, Dieudonné interprète son premier spectacle en solo, Dieudonné tout seul, qui a pour thème un fait divers criminel raconté par divers témoins, chacun ayant sa propre version de l'histoire (à la manière du film Rashōmon d'Akira Kurosawa). La pièce bénéficie dans la presse française d'un accueil très positif, parfois même dithyrambique, certains chroniqueurs saluant en Dieudonné un comique « social », voire « intello ». Lui-même qualifie son spectacle de « très social » et « politique », le liant étroitement aux « problèmes qui [le] touchent » : « Ma situation financière s'est améliorée, mais je me sens toujours concerné par la galère des chômeurs, des jeunes de banlieue : ça me révolte. [...] Je me sers de l'humour pour agir ». D'une manière générale, il qualifie ses one-man-shows de « point de vue humoristique sur le monde », et considère que « toute démarche artistique provient d'un engagement, d'une utopie », qu'il résume le concernant dans l'espoir « de voir un jour une société métissée, mélangée, où toutes les religions, toutes les cultures vont vivre en bonne harmonie ».
En 1998, Dieudonné participe à la chanson Je crois que ça va pas être possible, présente sur l'album Essence ordinaire du groupe Zebda. Il continue également d'investir dans des projets artistiques en Eure-et-Loir : en 1999, il achète la ferme de la Moufle à Vert-en-Drouais pour la transformer en plate-forme culturelle et accueillir des jeunes, notamment issus des cités populaires, dans « un endroit un peu roots ». Ce projet suscite une polémique locale et finalement n'aboutit pas. Le maire du village, qui avait soutenu le projet malgré l'opposition d'une partie des riverains, accuse par la suite l'humoriste de ne pas s'être sérieusement impliqué et de n'avoir cherché qu'à entretenir sa propre publicité. À partir de 1999, Dieudonné loue à Paris le théâtre de la Main d'Or, où il se produit régulièrement lui-même, tout en accueillant, produisant et mettant en scène des représentations d'autres artistes.
Au début des années 2000, Dieudonné écrit et interprète à intervalles réguliers des spectacles en solo qui lui valent une réputation d'humoriste talentueux, doué notamment pour la provocation et capable d'aborder des thèmes ambitieux. En 2001, son deuxième spectacle en solo, Pardon Judas, fait réapparaître en pleines fêtes du Jubilé l'apôtre réputé pour avoir facilité l'arrestation du Christ, et dépeint l'embarras de l'Église catholique et de la communauté scientifique à la suite de cet événement. C'est l'occasion pour lui de réhabiliter Judas, dont il se sent « plus proche […] que de l'Église de la chrétienté », et plus largement de traiter des religions monothéistes, auxquelles il réserve un traitement particulièrement critique ; il adresse notamment des piques féroces à l'islam, ainsi qu'à l'Église catholique, qu'il accuse d'être « guerrière, totalitaire, au service de l'aristocratie et de l'armée, tellement loin de la parole prophétique », et coupable d'avoir organisé la traite des Noirs. Ce spectacle lui vaut d'ailleurs des menaces. Néanmoins, il attaque bien moins les religions elles-mêmes que les institutions et les dogmes religieux, ainsi que les institutions agissant au nom de la religion, estimant que « si les prophètes — Jésus, Mahomet, Bouddha, Abraham et les autres — étaient là, ils seraient d'accord avec moi pour dire qu'il n'existe aucune frontière religieuse entre les hommes ». Il juge également que « les questions mystiques restent d'actualité. Il faut leur trouver des formules poétiques capables de combler certains doutes » ; ou encore que « la spiritualité appartient à tous, à l'infini, à l'éternité, c'est à nous de la gérer. Ce mot est chargé de sens et de signification. Je crois que la spiritualité peut-être beaucoup plus simple : elle peut se passer de mots. […] L'écrit a enfermé et tué le message ». Il précise cependant que « la charte des droits de l'homme » est sa « seule religion ».
La Dépêche du Midi parle à l'époque du « phénomène Dieudonné », capable d'amuser comme de déranger, et qui « a une façon de passer les bornes qui rappelle le Charlie Hebdo de la première heure ». L'intéressé reconnaît volontiers qu'à ses yeux, « l'humour le plus efficace s'exprime souvent dans les situations les plus tragiques ». En mars 2003, il reçoit le Grand Prix de l'Humour noir, catégorie spectacle, pour Le Divorce de Patrick dans lequel il met en scène son ami Patrick en pleine crise conjugale, mais également la réunion de briefing des terroristes des attentats du 11 septembre 2001, à travers laquelle il dénonce à nouveau le fanatisme religieux.
Dieudonné continue en parallèle d'apparaître au cinéma, principalement dans des comédies. Il tient des seconds rôles importants dans Le Derrière, réalisé par Valérie Lemercier, puis Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre, réalisé par Alain Chabat, et joue l'un des rôles principaux dans HS Hors Service, de Jean-Paul Lilienfeld. Il multiplie par ailleurs les collaborations artistiques, comme en 2000 un duo avec Gad Elmaleh dans un rap parodique intitulé J'ai la haine, ou des participations à des albums de musiciens comme La Brigade, Saïan Supa Crew, Tom Novembre, Oxmo Puccino ou Disiz.
Revenant en 2014 sur la carrière de Dieudonné, Le Figaro juge que ce dernier, avant son évolution politique, a « peut-être été le meilleur » des humoristes français ; le journal cite en exemple son one-man-show de 2003, Le Divorce de Patrick, « un spectacle culte, drôle et méchant ». Dressant un bilan similaire, L'Express estime également que Dieudonné était « un des meilleurs comiques de sa génération, avant de basculer dans une autre dimension ».
Débuts en politique
Premiers engagements
Dieudonné, qui dit n'avoir « jamais vraiment souffert » du racisme dans sa jeunesse, déclare avoir « commencé à militer à l'âge de 16 ans [en 1982], à l'époque des événements qui bouleversaient la Nouvelle-Calédonie. Je me suis senti très proche de la population kanak et de son combat pour la dignité et la liberté. À mon niveau, j'ai donc milité dans la rue, en bombant ici et là FLNKS ».
Il s'intéresse à nouveau à la politique en 1995, à l'occasion de l'affaire Ibrahim Ali. Sa rencontre avec les parents de ce jeune d'origine comorienne, tué par un militant du FN, est pour lui « comme un déclic », qui le pousse à prendre position contre l'extrême droite, un combat que son intérêt pour la cause kanak avait, d'après lui, préparé. Son installation près de Dreux, terre d'élection traditionnelle du FN, l'amène notamment à vouloir s'engager contre ce parti qu'il qualifie alors de « cancer » et analyse comme un facteur de « repli communautaire » et de « folie fascisante ».
Dieudonné lance une formation politique, le « Parti des utopistes ». Lors des législatives de 1997, il se porte candidat dans la deuxième circonscription d'Eure-et-Loir (Dreux et environs), pour s'opposer à Marie-France Stirbois, représentante locale du Front national. Dieudonné s'adresse presque exclusivement, durant sa campagne, aux jeunes des cités populaires, à qui il promet des stages sportifs et des projets culturels. Selon divers témoignages, Dieudonné mène à l'époque une campagne superficielle, sans local de permanence ni réelle présence sur le terrain, et semble essentiellement avoir voulu « apporter sa popularité » en se basant sur son aura auprès de la jeunesse locale. Il obtient 7,74 % des suffrages (3 145 voix). Le combat de Dieudonné contre Marie-France Stirbois — qui est alors une personnalité très en vue du Front national — lui vaut d'être encensé par une partie de la gauche : Noël Mamère le rencontre et fait son éloge tandis que l'humoriste Marc Jolivet, proche des Verts, lui présente Daniel Cohn-Bendit. Parmi les autres humoristes, Guy Bedos fait part à l'époque de son admiration pour Dieudonné ; Édouard Baer, qui fait sa connaissance à l'époque, pense un temps monter avec lui un projet de film sur l'Afrique. Ayant fait l'objet d'attaques racistes, Dieudonné sollicite alors la LICRA.
Dieudonné revendique le sérieux de ses engagements, ce qui contraste avec son image de comique et surprend parfois les médias. Face à cette circonspection, il affirme que « l'idée du chacun à sa place ne peut plus être acceptée par les différentes minorités qui composent ce pays. Le Noir qui fait rire ou qui joue au football a le devoir d'utiliser son image médiatique afin de permettre à sa minorité de s'exprimer sur les graves injustices qu'elle subit depuis longtemps ». Il prend notamment position en faveur de la régularisation des sans-papiers et du droit de vote des immigrés, ainsi que du droit au logement, en soutenant le DAL, ponctuellement mais activement. De même, il milite à l'occasion avec SOS Racisme, qu'il juge néanmoins trop proche du Parti socialiste. D'une manière générale, il se montre méfiant à l'égard « des dirigeants » et « du pouvoir », et appelle, face à un appareil politique « grippé », à « réinventer le rapport entre le pouvoir et le peuple ». En 1998, il est candidat aux élections régionales dans le Centre, à la tête de la liste divers gauche Les Utopistes. Il déclare à l'époque vouloir participer à faire barrage au Front national. Sa liste obtient 4,77 % des suffrages. En 1999, il participe, avec la romancière Calixthe Beyala, au collectif Égalité, qui contribue à lancer en France le débat sur la discrimination positive, les quotas de minorités, et la visibilité des personnes dites de couleur dans les médias. En 2000, il rejoint un collectif d'humoristes européens anti-Haider. La même année, il reçoit de l'ONU le titre honorifique d'« homme de bonne volonté dans sa lutte contre le racisme ». Lors des élections municipales de 2001, il envisage se présenter et reçoit le soutien de Daniel Cohn-Bendit, avant de renoncer et de soutenir dès le premier tour la gauche plurielle. Il apporte par ailleurs son soutien à la liste des Motivé-e-s à Toulouse.
Le 30 novembre 2000, il annonce son intention d'être le candidat des Utopistes à la présidentielle 2002. Dans le cadre de cette candidature, Dieudonné se réclame de la « troisième gauche verte » et se dit « convaincu que la droite c'est le passé », alors que la gauche incarne à ses yeux « le présent » et « les forces progressistes ». Il se veut par ailleurs le porte-parole « d'une partie de ceux qui ne se reconnaissent pas dans le discours, selon [lui] dépassé, de la politique » au sein d'un régime qu'il juge non démocratique. Il se veut en particulier porte-parole des descendants d'esclaves noirs, présentant l'esclavage comme la « tragédie la plus terrible de l'histoire de l'humanité » et mettant en garde contre « un deux poids deux mesures » dans l'indemnisation des descendants des victimes de crimes historiques. Il souligne toutefois que son « principal combat, c'est le logement et la justice sociale » : il propose à ce titre les « Toits du cœur », sur le modèle des Restos du cœur de Coluche. Le 22 février 2001, l'indicateur Ifop pour L'Express le crédite de 4 % d'intentions de vote, à égalité avec François Bayrou. Parmi les autres candidats, seul Jean-Pierre Chevènement dit souhaiter qu'il aille jusqu'au bout car « il prend des suffrages à Mamère ». Sa démarche lui attire néanmoins la sympathie de Stéphane Pocrain, porte-parole des Verts, pour qui « le paysage politique français a besoin de trouble-fête. ‘Dieudo' est une des voix de la gauche critique ». En revanche, Daniel Cohn-Bendit juge qu'il est « inutile de tenter de faire un remake de Coluche en 1981 », et Jean-Luc Benhamias, directeur de campagne des Verts, considère que Dieudonné « devient mauvais, très rancunier » lorsqu'il fait de la politique. Le comité de soutien de l'humoriste revendique les 500 parrainages nécessaires pour se présenter en février 2002, peu avant le début de son nouveau spectacle Cocorico ! lequel « retrace le parcours d'un clown qui se présente à l'élection présidentielle ». Cette coïncidence conduit le journaliste Didier Hassoux à le qualifier de « spectacle-meeting » et à s'interroger : « La pseudo-campagne électorale de l'artiste ne serait-elle qu'une vulgaire opération commerciale ? » Dieudonné échoue finalement à recueillir les 500 parrainages ; lors de sa campagne, il avait regretté que ceux-ci ne soient pas attribués par les citoyens plutôt que par les élus.
Après sa candidature présidentielle avortée, il se présente aux législatives dans la huitième circonscription du Val-d'Oise — avec comme suppléante la chanteuse martiniquaise Joby Valente, vice-présidente du Collectif des Filles et Fils d'Africains Déportés (COFFAD) — face au député PS sortant, Dominique Strauss-Kahn. Il vise alors notamment l'électorat de la communauté afro-antillaise. Accusé de communautarisme, il réplique en renvoyant Dominique Strauss-Kahn « à son propre communautarisme » et en ajoutant : « Il a été ministre des Finances, mais j'aurais aussi aimé qu'il apporte une aide au peuple palestinien qui subit des humiliations terribles ». Durant sa campagne, il déclare également : « Je me défie de tout communautarisme, contrairement à DSK, qui soutient les intérêts d'Israël ». Dieudonné revendique par ailleurs à cette occasion le soutien que lui apporte le Parti des musulmans de France. Il recueille finalement 2,18 % des suffrages.
Dans la première moitié des années 2000, Dieudonné semble essentiellement viser à fédérer, par son action politique, les différentes communautés noires de France : il attire autour de lui différentes associations et personnalités, notamment antillaises, qui voient en lui un porte-parole médiatique. Le parallélisme entre la traite négrière et la Shoah tient une place importante dans le discours du COFFAD, qui fait alors partie du « noyau dur » de l'entourage de Dieudonné.
De 2000 à 2003 : premiers propos polémiques
En 2000, Dieudonné projette de se lancer dans l'écriture et la réalisation d'un film sur l'histoire de la traite négrière, centré autour du Code noir. À la même époque, il commence à se rapprocher de certains mouvements noirs radicaux, notamment la Nation of Islam américaine qui tente alors de s'implanter en France. Dieudonné permet à l'aile française de la NOI d'organiser au théâtre de la Main d'Or un meeting, auquel assiste par ailleurs Kémi Séba, alors âgé de 18 ans. Le 21 mars 2000, Dieudonné accorde à France-Soir un entretien dans lequel il déclare : « Les Noirs ne sont autorisés que dans quelques plages d'expression : le sport et l'humour… et on ne pourra jamais aller plus loin, avoir des responsabilités, car les Noirs ne sont que des grands enfants, des clowns pour le Blanc esclavagiste, le capitaliste puissant ; il n'y a pas beaucoup de différence entre les patrons de TF1 et le Blanc qui gérait les plantations aux Caraïbes ; ils considèrent les Africains et les Antillais comme des gens de carnaval, de fête ; on ne parle que pour faire rire ; jamais nous ne pourrons être des hommes de pouvoir [...]. Le Béké (le « Gros Blanc ») est fini… La survie ne tient que dans le métissage. Et moi, j'observe, avec le sourire, sa déchéance [...]. Lutter contre la discrimination raciale, c'est aussi demander au garant de cette soi-disant morale, le pape Jean-Paul II, de démissionner ; car il n'est pas l'envoyé de Dieu, c'est un homme comme les autres ; l'Église catholique cautionne l'argent, la différence et le racisme ; après avoir demandé pardon à Dieu, le pape aurait dû dire à l'humanité : « vous êtes libres », car aujourd'hui, les hommes n'ont plus besoin de leader. » Ces propos lui valent un procès pour « diffamation raciale et religieuse » de la part de l'AGRIF — une association proche du Front national — qui l'accuse de racisme antiblanc et anticatholique. Condamné en première instance, Dieudonné est finalement relaxé en appel en mars 2002, puis en cassation en mars 2003.
Dieudonné demande au Centre national de la cinématographie (CNC) une aide à l'écriture pour son film sur le Code noir. Cette subvention lui est refusée en janvier 2002. Dieudonné reviendra à plusieurs reprises sur ce refus en accusant « les sionistes du CNC » de pratiquer un « deux poids, deux mesures », dénonçant par là le mauvais sort mémoriel fait selon lui à la traite des Noirs, en comparaison de celui réservé à la Shoah. Des associations antiracistes telles l'Union des étudiants juifs de France (UEJF), la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (LICRA) — soutien du projet à l'origine —, la Ligue française pour la défense des droits de l'homme et du citoyen (LDH) dénoncent par la suite le caractère antisémite de ces propos. Dieudonné considère que ce refus du CNC a eu un rôle déclencheur dans ses prises de positions ultérieures.
Le 29 janvier 2002, alors qu'il tente de se porter candidat à l'élection présidentielle, Dieudonné accorde un entretien à Lyon Capitale dans lequel il déclare : « Le racisme a été inventé par Abraham. « Le peuple élu », c'est le début du racisme. Les musulmans aujourd'hui renvoient la réponse du berger à la bergère. Juifs et musulmans pour moi, ça n'existe pas. Donc antisémite n'existe pas parce que juif n'existe pas. Ce sont deux notions aussi stupides l'une que l'autre. Personne n'est juif ou alors tout le monde. Je ne comprends rien à cette histoire. Pour moi, les Juifs, c'est une secte, une escroquerie. C'est une des plus graves parce que c'est la première. Certains musulmans prennent la même voie en ranimant des concepts comme « la guerre sainte ». » Des associations de lutte contre l'antisémitisme (UEJF, LICRA) et le Consistoire décident de porter plainte pour injure raciale. Élie Semoun, de son côté, l'accuse de devenir « une sorte de Le Pen de gauche ». L'humoriste est relaxé en première instance ; cette relaxe est confirmée par la cour d'appel de Paris en février 2006, mais finalement un pourvoi aboutit, en février 2007, à la cassation en assemblée plénière de cette relaxe, la cour estimant que l'expression « les Juifs, c'est une secte, une escroquerie. C'est une des plus graves parce que c'est la première » constitue bien une injure antisémite, car « injure visant un groupe de personnes en raison de son origine ».
En février 2002, dans un entretien pour L'Écho des savanes, il déclare : « Ben Laden restera dans l'histoire, sa notoriété est internationale et indiscutable. Pour moi, c'est le personnage le plus important de l'histoire contemporaine. Il a réussi à changer les rapports de force. Il est seul contre la plus grande puissance du monde. Donc forcément cela impose le respect ». Ces propos provoquent une nouvelle controverse — il se défend en assurant ne pas soutenir Ben Laden, qu'il qualifie de « fou » dont « il ne respecte ni l'action ni la guerre sainte » — et lui valent d'être poursuivi par le parquet de Paris pour « apologie du terrorisme ». Il est définitivement relaxé en juin 2004.
En juin de la même année, au moment des élections législatives, Le Point rapporte la phrase de Dieudonné sur Dominique Strauss-Kahn qui servirait « les intérêts d'Israël », et souligne que le comique a « une nouvelle fois dérapé ».
En octobre 2002, dans un entretien accordé au site Internet Blackmap et qui passe inaperçu dans un premier temps, Dieudonné parle des Juifs comme d'un « peuple qui a bradé l'holocauste, qui a vendu la souffrance et la mort, pour monter un pays et gagner de l'argent ». Interrogé sur « l'amélioration de la visibilité des Noirs en France, que ce soit dans le domaine artistique ou dans d'autres domaines », il se plaint ainsi de la situation : « Non, je pense que les Noirs font toujours peur. Il existe toujours un lobby très puissant qui a le monopole de la souffrance humaine et qui ne nous reconnaît absolument aucune existence ! […] Le lobby juif déteste les Noirs, vraiment ! Étant donné que le Noir, dans l'inconscient collectif, porte la souffrance, le lobby juif ne le supporte pas, parce que c'est leur business ! Maintenant, il suffit de relever sa manche pour montrer son numéro et avoir droit à la reconnaissance. »
Basculement de son image
Intervention sur France 3 en 2003
La polémique reprend lorsque, le 1er décembre 2003, sur le plateau de l'émission On ne peut pas plaire à tout le monde animée par Marc-Olivier Fogiel, Dieudonné interprète, au cours d'un sketch, un colon israélien extrémiste, portant un chapeau de Juif orthodoxe, des papillotes, une cagoule et un treillis militaire. Le personnage joué par Dieudonné qualifie d'« acte antisémite » la présence de Jamel Debbouze sur le plateau, avant de lancer un appel aux jeunes des cités : « Convertissez-vous comme moi. Rejoignez l'axe du bien, l'axe américano-sioniste, qui vous offrira beaucoup de débouchés », puis de conclure son discours par un cri, que la plupart des médias retranscrivent par « Isra-heil ! », et par une parodie de salut nazi. Ce sketch, qui avait fait rire Jamel Debbouze et le public, mais mis mal à l'aise Fogiel entraîne un avertissement du CSA à France 3, ainsi qu'une plainte de la LICRA, de l'UEJF et du Consistoire pour diffamation raciale. Dieudonné est relaxé en première instance, puis également en appel en septembre 2005, et enfin en cassation le 3 avril 2007. Dieudonné affirmera devant la justice avoir simplement crié « Israël ! » La Cour estime sur ce point précis que l'expression est inaudible, mais n'est « en toute hypothèse pas Israheil » (selon le compte-rendu du jugement) et que le geste est trop mal exécuté pour être assimilé à un vrai salut nazi, déboutant ainsi les plaignants. Dans un entretien accordé à la suite de la plainte de l'UEJF, Dieudonné reprend pourtant à son compte l'expression « Isra-heil ! » et qualifie son geste de « salut fasciste, plus impérialiste dans [son] esprit que fasciste ».
Cet épisode marque le début d'un tournant dans l'image publique de Dieudonné. Ses opposants lui reprochent dès lors, non seulement de pratiquer le communautarisme en mettant en concurrence les mémoires, mais également de mêler son discours d'antisémitisme. Pierre-André Taguieff juge en 2004 que le discours de l'humoriste relève des « thèmes récurrents qui structurent l'imaginaire antijuif moderne ». Ses partisans avancent pour leur part l'« anticommunautarisme » et l'« antisionisme » qu'il revendique. Dieudonné, lui, affirme qu'après le succès en 2003 de son sketch La fine équipe du 11 dans lequel il se moquait des terroristes islamistes, il souhaitait se moquer de certains Juifs pour montrer qu'il n'avait pas de parti pris anti-musulman. Il se défend des accusations d'antisémitisme et porte plainte contre Marc-Olivier Fogiel pour la diffusion, durant l'émission, d'un SMS écrit par un assistant de l'animateur et qui réagissait au sketch sur le colon juif en disant « Dieudo, ça te ferait rire si on faisait des sketches sur les odeurs des blacks ? » L'animateur est finalement condamné en 2005 pour « injure à caractère racial ».
Nouvelles polémiques et radicalisation politique en 2004-2005
En janvier 2004, Dieudonné accorde au magazine britannique The Source un entretien dans lequel il s'en prend à l'animateur Arthur, lui reprochant notamment de « financer de manière très active (avec sa société de production) l'armée israélienne qui n'hésite pas à tuer des enfants palestiniens ». Arthur porte plainte : en juin 2006, Dieudonné est condamné pour diffamation.
En février 2004, Dieudonné joue à la Bourse du travail de Lyon. Une manifestation, regroupant des membres du Consistoire, de l'UEJF et de la Fédération sioniste de France, est organisée contre l'humoriste devant le théâtre ; d'abord pacifique, elle tourne mal lorsque des manifestants entrent dans le théâtre et perturbent la représentation. Quelqu'un allume une mèche dans une bouteille contenant de l'acide, ce qui diffuse de la fumée dans la salle. Deux personnes sont légèrement blessées lors des échauffourées dans le public. Le lendemain, l'UEJF condamne ces incidents.
Quelques jours plus tard, Dieudonné accorde un entretien au Journal du dimanche et revient sur la manifestation et l'agression lors du spectacle. À une question d'un journaliste lui demandant comment il a vécu les manifestations avant son spectacle, il répond : « Les ligues juives insultaient les spectateurs, ils m'insultaient moi. Pire, ils ont commis un attentat. Que le CRIF ne condamne pas et excuse même ! Un homme a été arrêté, qui fait partie de ces mouvements d'extrême droite sionistes, racistes et xénophobes. « Sale nègre », « les Juifs auront ta peau », voilà le genre de slogans que j'ai entendus. Ce sont tous ces négriers reconvertis dans la banque, le spectacle et aujourd'hui l'action terroriste qui manifestent leur soutien à la politique d'Ariel Sharon. Ceux qui m'attaquent ont fondé des empires et des fortunes sur les traites négrières et l'esclavage. Ils m'accusent d'être antisémite. Ça n'a aucun sens, personne dans ma famille n'a servi dans la Wehrmacht. Mais c'est Israël qui a financé l'Apartheid et ses projets de solution finale. » Ces propos relancent la polémique et valent à Dieudonné d'être condamné, le 10 mars 2006, à 5 000 € d'amende pour « provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence raciale ou religieuse ». Après plusieurs années de controverses liées à ses déclarations sur les Juifs, l'humoriste subit sa première condamnation pour propos antisémites ; elle est confirmée en appel le 15 novembre 2007.
À la suite de l'incident de Lyon, le spectacle que Dieudonné devait donner à l'Olympia est annulé. Dans le courant de 2004, l'humoriste est en butte à l'hostilité de divers militants juifs, notamment ceux de la Fédération sioniste de France qui réussit à faire annuler plusieurs de ses représentations en menant des actions parfois violentes. Dieudonné prétend avoir, dès cette époque, fait l'objet d'un « lynchage » médiatique. La journaliste Anne-Sophie Mercier, qui lui a consacré un livre d'enquête, souligne au contraire qu'à l'époque, il faisait encore l'objet, de la part d'une grande partie des médias et du monde du spectacle, d'une « étonnante mansuétude ». En effet, si ses invitations dans les médias se raréfient durant quelques mois du début de 2004 — Laurent Ruquier dit avoir reçu des instructions en ce sens — elles reprennent ensuite dans le courant de l'année ; Thierry Ardisson le reçoit à deux reprises à l'émisson Tout le monde en parle sur France 2. Des personnalités comme Édouard Baer, Gérard Miller ou Ariel Wizman s'éloignent de lui dès cette époque, mais d'autres, comme Laurent Ruquier, Bruno Gaccio, Christophe Alévêque ou Guy Bedos, lui accordent encore leur soutien. Noël Mamère, l'homme politique dont il est alors le plus proche, reconnaît qu'il a « totalement déraillé » dans son sketch, mais continue de lui trouver des circonstances atténuantes. Les attaques dont Dieudonné fait l'objet ont en outre pour effet de le mettre dans la position de la victime, et lui valent des soutiens au nom de la liberté d'expression. L'Union juive française pour la paix dénonce à l'époque les menaces qu'une « frange d'extrémistes » fait peser sur Dieudonné.
À partir d'avril 2004, Dieudonné interprète un nouveau one-man-show, ironiquement intitulé Mes excuses. Dieudonné avait initialement prévu d'intituler le spectacle Mes excuses, dans ton cul, avant de le renommer pour « calmer le jeu ». Il y expose de manière récurrente une vision du monde où les Juifs règnent sur la pensée et le discours. Des comparses, déguisés en militaires, incarnent une « police de l'esprit », qui vient régulièrement le rappeler à l'ordre durant le spectacle. On lui interdit notamment de prononcer le mot « Palestinien » et on lui rappelle que « lécher le cul du CRIF est recommandé ». Dieudonné présente au début du spectacle ses « excuses » au « peuple élu », mais enchaîne ensuite sur un bras d'honneur. Pierre-André Taguieff souligne qu'à l'occasion de ce spectacle, l'humoriste ne s'en prend plus aux seuls « sionistes » mais bien, explicitement, aux Juifs dans leur ensemble.
Toujours en 2004, le rabbin Haïm Korsia, conseiller du grand-rabbin de France Joseph Sitruk, souhaite emmener l'humoriste à Auschwitz. Ce projet est annulé la même année, à la suite notamment de réactions négatives du Grand-rabbinat et de la commission Shoah du Consistoire. Dieudonné se rend par la suite seul à Auschwitz, à titre privé.
En février 2004, l'association Coordination des appels pour une paix juste au Proche-Orient, organisation pro-palestinienne mais également radicalement anti-israélienne, apporte son soutien à Dieudonné, dénonçant le fait que celui-ci soit privé de sa liberté d'expression « parce qu'il ose brocarder la politique d'Israël et le communautarisme juif ». Dieudonné figure ensuite sur la liste EuroPalestine, présentée par l'association aux élections européennes de juin dans la circonscription Île-de-France : la liste n'obtient que 1,83 % des suffrages exprimés (50 037 voix). Après cet échec, Dieudonné s'éloigne en octobre de ses anciens colistiers ; ceux-ci reprochent à Dieudonné de suivre « une pente très glissante » en fréquentant des personnalités comme Alain Soral, ou comme Ginette Skandrani, proche des milieux négationnistes. Dieudonné, pour sa part, déclare rompre avec EuroPalestine à cause d'un désaccord sur la transformation de la liste en mouvement politique.
Il cofonde ensuite l'association Les OGRES Utopistes Concrets (OGRES étant l'acronyme de « Ouvertures géographique religieuse ethnique sociale »). Le site Internet de ce groupe est mentionné dans un rapport de Jean-Yves Camus sur l'antisémitisme en France comme étant le « plus virulent » en matière de contenu anti-juif. Le MRAP porte plainte contre le site et dénonce la diffusion de « propos infâmes qui rappellent les pires heures de l'occupation nazie et de l'antisémitisme français ». Anne-Sophie Mercier juge en 2005 que ce site, à force d'adulation pour Dieudonné, en arrive à utiliser une rhétorique plus proche « de la secte que du parti politique ». Dieudonné parraine également l'association La Banlieue s'exprime : ce groupement, qui se signale surtout en animant un site Internet, dit vouloir apporter une réponse aux « révoltes » de 2005, mais fonctionne dans les faits comme une caisse de résonance des positions de Dieudonné.
Après l'aventure de la liste EuroPalestine, Dieudonné s'efforce de se présenter comme un porte-parole des revendications, non seulement des Noirs, mais également des Arabes. Son succès auprès de la communauté arabo-musulmane semble néanmoins avoir été beaucoup plus mitigé qu'auprès des Afro-antillais.
Le 11 novembre 2004, Dieudonné organise au théâtre de la Main d'Or une rencontre avec quatre rabbins de Neturei Karta (groupe marginal de Juifs ultra-orthodoxes antisionistes) venus à Paris prier pour le dirigeant palestinien Yasser Arafat, alors hospitalisé. Jean-Yves Camus voit à l'époque dans cette rencontre « la preuve tangible de la radicalisation de Dieudonné ».
Le 29 décembre 2004, Dieudonné donne au Zénith de Paris la dernière représentation de la tournée de Mes Excuses, en présence de plusieurs de ses soutiens comme Jamel Debbouze, Daniel Prévost, Djamel Bouras, Guy Bedos et Noël Mamère. Jouant devant cinq mille spectateurs, Dieudonné fait huer par la salle diverses personnalités juives du show-business et des médias français. Anne-Sophie Mercier voit dans cette représentation « le plus grand meeting antisémite qu'on ait vu en France depuis soixante ans », animé par « un homme de gauche, longtemps proche des Verts, héros de l'antiracisme ». Les médias français réagissent assez peu sur le moment ; ce n'est que le 3 février 2005 que la polémique rebondit vraiment quand Bernard-Henri Lévy, l'une des personnalités visées durant le spectacle, signe dans Le Point une tribune qui dénonce en Dieudonné un « fils de Le Pen ». Jean-François Kahn dénonce à son tour, dans Marianne, l'« immonde rhétorique de Dieudonné » et commente : « jamais vu depuis 60 ans : une salle de 5 000 personnes a fait une standing ovation à des propos répétitivement et ouvertement antisémites ». Claude Askolovitch, dans Le Nouvel Observateur, résume à la même époque le parcours de Dieudonné comme celui d'un homme passé « de la cause noire à la haine des Juifs ».
Dans le courant de l'année 2004, Dieudonné propose à Rony Brauman, qui l'a défendu au conseil d'administration de France Télévisions au sujet de son sketch polémique sur France 3, de participer à un livre constitué des courriers racistes qu'il reçoit pour « traiter la question du sionisme, son histoire, ses objectifs théoriques, sa réalisation pratique ». Mais le projet avorte, Rony Brauman reprochant à Dieudonné un entretien télévisé au cours duquel celui-ci a accusé les Juifs d'avoir participé à la traite négrière et d'avoir bâti leur fortune sur ce commerce.
Le 16 février 2005, lors d'une conférence de presse à Alger, Dieudonné qualifie la commémoration de la Shoah (à l'occasion du soixantième anniversaire de la libération des camps) de « pornographie mémorielle ». Ces propos entraînent une nouvelle polémique et un procès. Dans le même temps, il s'en prend au « lobby sioniste, qui cultive l'unicité de la souffrance » et se plaint de ne pouvoir réaliser son film sur la traite des Noirs à cause des « autorités sionistes » qui dominent, selon lui, le CNC. Lors de cette même conférence de presse, Dieudonné s'en prend également au CRIF et au Premier ministre d'alors, Jean-Pierre Raffarin, à qui il reproche d'avoir condamné les artistes qui cherchent à « faire applaudir la haine » au cours d'un discours prononcé lors du dîner du CRIF : « Il y a le CRIF, cet organe d'inquisition qui est là — il y avait dix-sept ministres de la République et Raffarin en personne qui étaient au CRIF le week-end dernier — qui m'accuse maintenant parce que, évidemment, le CRIF, faut toujours leur lécher le cul, à cette équipe de malfrats, cette mafia qui est en train d'entraîner la République française dans la guerre civile, s'ils continuent à faire ça. » Dieudonné est finalement condamné, en 2008, à 7 000 euros d'amende pour diffamation publique à caractère racial.
En mars 2005, peu après l'affaire de ses propos à Alger, Dieudonné se rend en Martinique pour y donner une représentation de Mes excuses. Immédiatement après son arrivée, il est agressé et frappé par quatre Juifs d'extrême droite, tous proches de la Ligue de défense juive. Ceux-ci expliqueront ensuite avoir reconnu « fortuitement » Dieudonné à l'aéroport et avoir décidé de lui « donner une leçon ». L'affaire fait grand bruit en Martinique, où Dieudonné reçoit le soutien de plusieurs élus indépendantistes comme Garcin Malsa, et profite notamment de ses contacts au sein de l'extrême gauche locale. Le 4 mars, alors que ses agresseurs sont jugés en comparution immédiate, une manifestation de soutien a lieu devant le tribunal de Fort-de-France. Les manifestants scandent « Dieudonné est mon frère, Dieudonné est mon sang », certaines personnes criant « Mort aux Juifs ! » Lors du procès, Dieudonné assure que les ancêtres de ses agresseurs auraient acheté des esclaves noirs, et présente les quatre hommes comme un « commando d'élite de l'armée israélienne ». Les quatre hommes sont condamnés à un mois de prison ferme. Le lendemain du procès, l'écrivain martiniquais Aimé Césaire reçoit Dieudonné ; il déclare « il est jeune, il va à l'essentiel, il a mon soutien », et désigne ensuite l'humoriste par ces mots : « la jeunesse, l'avenir et cela me réconforte ». Des proches d'Aimé Césaire dénoncent par la suite l'instrumentalisation de ce dernier par Dieudonné, et affirment que Césaire, alors âgé de 92 ans, ignorait tout de l'humoriste. L'historien Pap Ndiaye va jusqu'à parler de « captation d'héritage ».
Le 28 mars, Dieudonné est interrogé à l'antenne de Beur FM. L'essentiel de ses propos tourne autour du « complot sioniste ». Pierre-André Taguieff, analysant son discours, juge qu'il se fonde sur « une vision conspirationniste du monde, où ceux qu'il appelle « les sionistes », incarnation du Mal, tiennent le rôle principal ». Durant l'émission, Dieudonné revient notamment sur le profit qu'auraient tiré certains Juifs de la traite négrière, et plus globalement sur le rôle de la communauté juive : « Il y a eu des Juifs négriers qui s'en sont foutu plein les fouilles avec le commerce des Noirs. […] C'est une communauté qui a particulièrement bien gagné sa vie mais ça n'est pas la seule, les protestants, les chrétiens ont bien gagné leur vie. La communauté juive avait, aux États-Unis, quasiment le monopole sur les armateurs, les bateaux. […] Le premier article du Code noir, c'est : Nous interdisons le commerce aux Juifs. Mais pourquoi ? Parce que les Juifs avaient ce commerce-là, avaient le monopole de ce commerce depuis longtemps et qu'il fallait introduire une dimension chrétienne, c'est-à-dire qu'il fallait arrêter de castrer les mâles, il fallait arrêter de jeter les enfants à l'eau, donc à un moment donné la volonté du Code noir, c'est ça. » Il déclare également : « dans le livre de classe de mes enfants, j'ai arraché les pages sur la Shoah. Je le ferai tant que notre douleur ne sera pas reconnue ». Les propos de Dieudonné, outre le fait d'imputer aux Juifs un comportement génocidaire à l'égard des Noirs, sont historiquement faux, les Juifs n'ayant bénéficié d'aucun monopole dans le commerce de l'esclavage. Interrogé trois jours plus tard sur Méditerranée FM, il déclare : « La vérité, c'est qu'effectivement, ce peuple juif qui se dit persécuté de toujours a aussi participé à des persécutions ignobles. Il faut aussi qu'il assume ». Dans les jours qui suivent son intervention sur Beur FM, Dieudonné diffuse sur Internet un appel à la lutte contre le « racisme anti-goy ».
Le politologue Pascal Boniface, qui avait jusque-là défendu le droit de Dieudonné à la liberté d'expression, se souvient avoir constaté, en 2005, que les références aux Juifs devenaient « systématiques » dans ses spectacles. Il date de cette période la radicalisation de Dieudonné, jugeant que le « déferlement hostile » que ce dernier a subi et « l'interdiction de fait de sa présence dans les médias » l'ont amené à une « radicalisation extrême », notamment en faisant évoluer son entourage politique. Pour Pascal Boniface, l'humoriste a fini par donner « raison a posteriori à ses contradicteurs ». Le contenu politique est de plus en plus présent dans les sketches de Dieudonné. La critique d'Israël, du sionisme, de l'impérialisme américain et du colonialisme, ainsi que le thème, repris à Alain Soral, d'un « système mondial » soutenu par des complots, sont au centre de nombre de ses sketches. Au fil du temps, il glisse dans ses textes de nombreuses allusions aux attentats du 11 septembre 2001, dans une optique conspirationniste. Pierre-André Taguieff voit dans l'affaire Dieudonné « l'un des symptômes d'une politisation dangereuse des haines intercommunautaires ». Taguieff souligne à cet égard la tactique de Dieudonné — ouvertement reconnue par l'intéressé en 2005, lors d'un entretien avec Pierre Tevanian dont la vidéo est diffusée sur le site Les Ogres — qui consiste à employer systématiquement le terme « sioniste » pour éviter celui de « juif » ; le politologue fait cependant observer que si cette « ruse lexicale » a protégé Dieudonné de sanctions judiciaires, elle n'a « pas trompé ceux qui connaissent les tours et détours de la rhétorique anti-juive dans la période post-nazie ». Taguieff voit dans le cas de l'humoriste celui d'un « petit Farrakhan à la française » ; il écrit, en 2008 : « le comique, en même temps qu'il découvrait sa « négritude » pour aussitôt l'exploiter dans un sens victimaire [a organisé une vision du monde selon laquelle] les responsables de nos malheurs, ce sont les « sionistes », ou les nouveaux « maîtres du monde ». Depuis qu'il a réussi à se donner le double statut symbolique d'un ennemi déclaré des « sionistes » et d'une incarnation de la « cause noire », Dieudonné, habile démagogue sachant jouer de la provocation, est devenu un leader politique, atypique certes, ou si l'on préfère « décalé », mais capable de mobiliser une partie de l'opinion française ».
Le 8 mai 2005, Dieudonné se joint à une manifestation organisée par les Indigènes de la République, dont l'appel contre le « colonialisme » contemporain qui sévirait dans les Banlieues françaises correspond à sa stratégie intracommunautaire. Sa participation au défilé ne fait cependant pas l'unanimité : Francine Bavay et Gilles Manceron quittent la manifestation en découvrant la présence de l'humoriste.
À partir de 2005, diverses personnalités du monde du spectacle qui soutenaient jusque-là Dieudonné se désolidarisent progressivement de lui. Jamel Debbouze, en particulier, dit avoir réalisé l'évolution de Dieudonné en le voyant, lors de son spectacle au Zénith en décembre 2004, s'en prendre à des personnalités juives, et alimenter « le fantasme d'une France livrée aux « sionistes ». Thierry Ardisson décide de « siffler la fin de la récréation » et de cesser de l'inviter, commentant : « Dieudonné est a priori plus sympathique que Marcel Déat mais s'il parle comme lui, il n'a pas sa place chez moi ». Dieudonné de son côté accuse Ardisson de s'être « couché devant les Juifs ». En décembre 2005, différentes personnalités, parmi lesquelles des historiens et des sociologues, cosignent une tribune dans Le Monde pour souligner que « lutter contre les séquelles du colonialisme n'autorise pas les discours antisémites ». Les auteurs jugent que dans les « discours inacceptables » de Dieudonné — qui dérivent en partie de certaines théories antisémites colportées notamment aux États-Unis par Louis Farrakhan — la « matrice antisémite » est là, « avec son centre paranoïaque ».
Le 23 décembre 2005, Diéudonné annonce sa candidature à l'élection présidentielle de 2007. Continuant de se dire « anticommunautariste », il se pose de surcroît en adversaire du néolibéralisme et du néo-conservatisme, en se réclamant du président vénézuélien Hugo Chávez et de son projet de « république sociale universelle ». Annonçant que « dans cette campagne, Dieudo rimera avec Hugo », il dit souhaiter que la France devienne « le Venezuela de l'Europe » en rejoignant « le camp des nations résistantes au nouvel ordre mondial ». En octobre 2006, il annonce renoncer, faute de moyens, à sa candidature présidentielle.
Une personnalité de plus en plus controversée
Évolution de son entourage au cours des années 2000
Au milieu des années 2000, l'entourage de Dieudonné évolue sensiblement à mesure que sa personnalité devient plus controversée. Pascal Boniface juge rétrospectivement que durant cette période, les polémiques croissantes autour de Dieudonné et sa « visibilité » sur un « sujet sensible » « [n'ont] pas attiré autour de lui que des défenseurs de la liberté d'expression, mais également des gens qui avaient un agenda politique bien arrêté et ouvertement raciste et antisémite. »
Rencontre avec Alain Soral
Dans son ouvrage Jusqu'où va-t-on descendre ? Abécédaire de la bêtise ambiante, paru en 2002 avant la polémique du sketch de France 3, Alain Soral s'en était pris vivement à Dieudonné à qui il reprochait de fustiger « l'esclavagisme blanc ». Qualifiant l'humoriste d'« inculte et désormais pas drôle », Soral écrivait : « Si Dieudonné s'énerve sur le populo français, celui-là même qui en fait une vedette dans notre beau pays si peu raciste, c'est peut-être parce qu'il lui démange de montrer du doigt la communauté logiquement désignée par sa revendication d'une plus juste représentation des « minorités visibles » ? Une « communauté invisible » certes sur-représentée dans le show-biz en termes de quotas, mais à laquelle il doit aussi son doux statut de rigolo. » Ayant pris connaissance de ces écrits, Dieudonné souhaite rencontrer Soral. Courant 2004, les deux hommes font connaissance ; ils deviennent finalement amis et politiquement proches, étant notamment tombés d'accord, selon Soral, à propos de « l'antisionisme et du lobby juif ».
Alain Soral participe dès lors à des meetings de la liste EuroPalestine, au cours desquels il fait huer des personnalités juives : ces incidents contribuent à la rupture entre Dieudonné et CAPJPO-EuroPalestine, dont les responsables refusent également que les rabbins de Neturei Karta prennent la parole lors d'une de leurs réunions. Soral demeure par la suite un très proche allié de Dieudonné : il fait figure, de son propre aveu, d'« éminence grise » de ce dernier, ce qui permet d'observer une continuité entre les spectacles de l'humoriste et les discours de l'essayiste. En septembre 2007, Dieudonné assiste à l'université d'été d'Égalité et Réconciliation, l'association récemment créée et dirigée par Alain Soral. En décembre 2008, le théâtre de la Main d'Or devient officiellement le QG d'Égalité et Réconciliation.
Autres membres de son entourage
D'autres personnalités controversées rejoignent bientôt l'entourage de Dieudonné, parmi lesquelles Ginette Skandrani (militante politique cofondatrice des Verts, régulièrement accusée d'antisémitisme et de négationnisme, et admiratrice de Kadhafi), Pierre Panet (co-animateur du site Les Ogres, ancien syndicaliste CFDT puis SUD, devenu un partisan de Thierry Meyssan et des théories du complot concernant les attentats du 11 septembre 2001 ; il interprète en 2005 un one-man-show produit et mis en scène par Dieudonné), ou encore Israël Shamir (écrivain, lui aussi objet d'accusations d'antisémitisme). Dieudonné noue par ailleurs des relations avec l'essayiste Christian Cotten, régulièrement dénoncé comme un conspirationniste et un « activiste pro-sectes ». Il rencontre également à plusieurs reprises, en 2006, le gourou Raël ; trois ans plus tard, il loue son théâtre à l'organisation de ce dernier pour qu'elle y organise une conférence sur les OVNI.
Dieudonné bénéficie en outre de réseaux politiques dans d'autres pays francophones. En Suisse, il bénéficie des relations helvétiques d'Alain Soral. Olivier Mukuna, un journaliste belge d'origine congolaise auteur de deux livres et d'un documentaire défendant Dieudonné, devient son principal propagandiste en Belgique, où l'humoriste est également soutenu par des personnalités comme Michel Collon et Jean Bricmont. Selon Jean-Yves Camus, Dieudonné permet également à d'autres mouvements de la « nébuleuse anti-juive » de fréquenter son théâtre, tels le Rassemblement étudiant de droite (RED, renouveau du GUD) ou la Droite socialiste (droite ultra), dont des tracts et imprimés — comme une affiche indiquant « Le sionisme, c'est comme la gangrène ! On l'élimine ou on en crève ! » — transitent par le théâtre de la Main d'Or.
À la fin des années 2000, la nouvelle compagne de Dieudonné, Noémie Montagne — qu'il a rencontrée en 2006 ou 2007 — commence à jouer un rôle déterminant dans l'entourage professionnel de l'humoriste, dont elle gère les affaires et produit les spectacles via sa société Les Productions de la Plume (qui succède à Bonnie Productions, finalement radiée en 2013). Cette société est détenue à parts égales par Noémie Montagne, Dieudonné et la mère de ce dernier.
Rapprochement avec les milieux islamistes
Dieudonné, qui fustigeait tous les monothéismes au temps de ses spectacles Pardon Judas ou 1905, et qui se dit encore athée au milieu des années 2000 — 1905 célèbre d'ailleurs le centenaire de la laïcité en France —, se rapproche désormais de certaines personnalités et organisations associées à l'islam conservateur radical. En mars 2005, il fait sur son site Internet l'éloge de Tariq Ramadan. Le mois suivant, il fait une apparition discrète au meeting annuel de l'Union des organisations islamiques de France. Il fait huer lors d'un de ses spectacles l'association anti-islamiste Ni putes ni soumises, et apporte son soutien à une collégienne musulmane qui refusait d'enlever son voile en cours, alors qu'il déclarait un an plus tôt soutenir la loi sur les signes religieux dans les écoles publiques. Il défend par ailleurs Al-Manar, la chaîne du Hezbollah, lorsque celle-ci est interdite d'émettre sur le territoire français. Il continue ensuite à fréquenter les milieux musulmans radicaux, qu'ils soient sunnites ou chiites ; lors de sa campagne pour la présidentielle de 2007, son bureau de campagne comprend l'imam Abdelhakim Sefrioui, responsable du « Collectif Cheikh Yassine », un groupe se réclamant du Hamas. Dieudonné est également en relation avec Yahia Gouasmi, responsable de diverses associations chiites liées à l'Iran, et dont le Parti antisioniste est la vitrine politique. Lui-même, par la suite, se dit volontiers « islamo-chrétien ». Revenant sur son passé « laïc » et « athée » dans l'entretien accordé à Causeur en février 2014, il précise : « Les frontières dressées par les religions me paraissaient dangereuses et sectaires. Et puis je me suis rendu compte que la religion laïque et athée pouvait être aussi intolérante que le fanatisme religieux ». Appelant à une « croyance commune », il estime que « les prophètes comme Mahomet ou Jésus-Christ nous ont montré la voie du rassemblement ».
Les 17 et 18 novembre 2005, Dieudonné participe à la conférence Axis For Peace organisée à Bruxelles par Thierry Meyssan et son association, le Réseau Voltaire. Il y intervient pour prôner l'usage d'Internet comme vecteur d'information et de mobilisation pro-palestinien, afin de constituer une alternative aux médias traditionnels qu'il accuse de diffuser un message sioniste et raciste ; il signe ensuite la déclaration finale de la conférence, qui dénonce la politique néo-conservatrice américaine « colonialiste ».
Plusieurs personnalités qui avaient, jusque-là, soutenu Dieudonné, s'inquiètent dès 2005 de l'évolution de son entourage. Noël Mamère croit l'humoriste victime de sa propre volonté d'être reconnu sur le plan politique, mais également de son « inculture » en la matière, qui lui ferait méconnaître Ginette Hess-Skandrani et sous-estimer la « dangerosité » de l'UOIF. Pascal Boniface partage cette analyse et souligne la « naïveté » de Dieudonné.
Relations avec les communautaristes noirs
Calixthe Beyala, après avoir vivement soutenu Dieudonné au temps des premières polémiques, prend ses distances avec lui ; l'humoriste côtoie désormais des personnalités noires plus radicales. Le Parti kémite, un groupuscule lié à la mouvance du kémitisme, tient des réunions au théâtre de la Main d'Or et assure occasionnellement la sécurité de Dieudonné ; la Tribu Ka, une scission du Parti kémite dirigée par Kémi Séba (et dissoute en 2006 par le gouvernement pour antisémitisme), soutient également l'humoriste. Dieudonné permet à la Tribu Ka d'organiser ses meetings au théâtre de la Main d'Or ; il leur retire ensuite l'hospitalité au motif que ses membres interdisent l'entrée aux non-noirs, puis les accueille à nouveau après que Kémi Séba a accepté de tenir des réunions ouvertes à tous. En septembre 2007, Dieudonné accueille et met en scène au théâtre de la Main d'Or un one-man-show de Kémi Séba, intitulé Sarkophobie.
Tout en tenant un discours étroitement communautariste à l'attention d'une partie de ses alliés, et en fréquentant des groupes radicaux, voire racialistes, Dieudonné continue de se présenter comme « universaliste » et opposé au communautarisme. Il fait notamment l'apologie du métissage, dont il se félicite d'être lui-même issu. Pierre-André Taguieff relève que l'un des paradoxes de Dieudonné tient à sa transformation en « agitateur communautariste », tout en dénonçant dans le même temps le communautarisme, « mais seulement du côté juif » : pour Taguieff, « la critique du communautarisme [par Dieudonné] relève de la pose, et n'est qu'une manière de justifier sa virulente critique de ce qu'il appelle le « lobby sioniste » ». La dénonciation du communautarisme des Juifs est à ce titre un aspect récurrent du discours « antisioniste », et représente aux yeux du politologue une variante du vieux thème d'accusation de « solidarité juive ». Taguieff analyse l'affaire Dieudonné comme « une mise en spectacle de la vague antijuive des années 2000 », doublement articulée à une « question noire » en cours d'émergence dans la culture politique française et à « une pathologie néo-gauchiste centrée sur la dénonciation du « racisme républicain » ».
Rapprochement avec le Front national
Dieudonné commence, à la même époque, à se rapprocher du Front national, qu'il avait combattu durant la décennie précédente. Il prend ainsi la défense de Bruno Gollnisch après les propos controversés tenus par ce dernier en 2004, et déclare : « J'ai des positions politiques qui sont radicalement opposées [à celles de M. Gollnisch], mais quand je vois ce qui se passe aussi avec M. Gollnisch : retirer son travail à quelqu'un sans que la justice ait pu se prononcer. On est dans un État de droit, sous la pression d'un lobby qui se croit tout permis dans ce pays. C'est ce qu'on me fait à moi, on m'interdit de jouer dans des salles simplement parce que je déplais à un petit groupe d'individus ». En 2005, avant même que le rapprochement entre Dieudonné et le Front national soit officiel, Anne-Sophie Mercier trouve « saisissante » la convergence entre le discours du comique et celui de Jean-Marie Le Pen, notamment dans l'emploi d'« une rhétorique datant d'avant-guerre quand il s'agit d'évoquer la puissance supposée des Juifs ». En avril 2006, Dieudonné accorde un entretien au journal d'extrême droite Le Choc du mois : il s'y présente comme « la vraie gauche », tandis que Jean-Marie Le Pen serait, lui, le champion de « la vraie droite ». Parmi les proches de Dieudonné, Alain Soral officialise à la fin de 2006 son engagement au Front national, rejoignant l'équipe de campagne de Jean-Marie Le Pen ; Marc George, coordinateur de la campagne présidentielle avortée de Dieudonné et coresponsable d'Égalité et Réconciliation, est lui-même un ancien militant du FN. Dieudonné et Soral fréquentent également l'homme d'affaires Frédéric Chatillon, prestataire du FN ancien chef du GUD. Ils accompagnent ce dernier à l'été 2006 lors d'un voyage au Liban et en Syrie, où Chatillon a de nombreux contacts haut placés.
Le 11 novembre 2006, Dieudonné se rend à la Fête des Bleu-blanc-rouge du FN au Bourget, où il rencontre Jean-Marie Le Pen et Bruno Gollnisch. Sa visite à la fête du FN est notamment organisée par Alain Soral et d'autres relations de l'humoriste comme le conseiller régional FN Farid Smahi et Frédéric Chatillon. Le Canard enchaîné souligne qu'il s'agit-là de l'aboutissement d'un long processus de rapprochement entre Dieudonné et une partie de l'état-major du FN. Dieudonné s'exprime ensuite à plusieurs reprises sur cette visite ; il dit s'inscrire dans une démarche de dédiabolisation et être sensible à « la main tendue [par Jean-Marie Le Pen] aux Français d'origines étrangères et plus particulièrement aux Français d'origine africaine ». Alain Soral et Marc George deviennent par la suite tous deux membres du comité central du FN. Ahmed Moualek, le responsable de La Banlieue s'exprime, approuve également le rapprochement entre Dieudonné et Jean-Marie Le Pen, et publie un long entretien avec ce dernier sur le site Internet de l'association.
En décembre 2006, Dieudonné invite Jean-Marie Le Pen et Thierry Meyssan à la représentation de son spectacle au Zénith de Paris. En mars 2007, il accompagne Jany Le Pen, épouse de Jean-Marie Le Pen et présidente d'une association humanitaire, lors d'un voyage au Cameroun destiné à alerter l'opinion sur le sort des Pygmées menacés par la déforestation. La découverte de ce peuple sera, d'après Dieudonné, « le déclencheur de l'écriture » de son spectacle J'ai fait l'con, représenté l'année suivante et qui débute par le récit de son voyage.
Le FN loue par ailleurs, pour la somme de 60 000 euros, le théâtre de la Main d'Or, pour les besoins d'une session de formation à la recherche des 500 signatures d'élus pour la présidentielle 2007.
Lors du scrutin présidentiel, Dieudonné appelle à voter José Bové au premier tour et Ségolène Royal au second. José Bové annonce pour sa part qu'il refuse le soutien de Dieudonné. Dieudonné ajoute cependant qu'en cas d'affrontement entre Jean-Marie Le Pen et Nicolas Sarkozy au second tour, il voterait pour Le Pen « sans problème », précisant que celui-ci n'ayant pas de majorité à l'assemblée, il ne pourrait gouverner, ce qui créerait une situation révolutionnaire. Le 1er mai 2007, il tente de pénétrer au stade Charléty où se déroule, avant le second tour, le meeting de Ségolène Royal, mais il est refoulé.
Au moment des législatives 2007, Dieudonné se déplace à Reims pour soutenir le candidat local du FN ; il déclare trouver important que les « hommes de bonne volonté se réunissent ».
En décembre 2007, l'état-major du FN assiste quasiment au grand complet — figurent notamment Bruno Gollnisch et Jany Le Pen — à la dernière représentation de son spectacle Dépôt de bilan au Zénith de Paris ; Frédéric Chatillon et Thierry Meyssan sont également présents.
En juillet 2008, Dieudonné fait baptiser sa fille par l'abbé traditionaliste Philippe Laguérie, avec pour parrain Jean-Marie Le Pen. Apprenant cette nouvelle, Élie Semoun déclare qu'il coupe définitivement les ponts avec Dieudonné. Dieudonné, en introduction de son spectacle J'ai fait l'con, présente ce parrainage comme un « coup de pub », et assure avoir voulu se moquer des médias français et de la « censure » ou « boycott » dont il se dit victime. Les auteurs du livre La Galaxie Dieudonné voient dans ce rapprochement, non pas une simple plaisanterie, mais une opération conjointe de Dieudonné et Jean-Marie Le Pen, l'un cherchant à faire parler de lui et l'autre à démontrer que son parti n'est pas raciste. Le politologue Jean-Yves Camus y voit également la traduction d'une volonté commune de « dynamiter le système », ce que semblent illustr
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(2004)
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